Pierre Pelot

Les grands méchants loufs

Albin Misardi – alias Jerry Lamen – tapait sur sa vieille machine à écrire : « Vous vous réveillez un matin et vous sentez immédiatement que la journée ne sera pas folichonne… »
Il imaginait sans doute que ce qu’il avait écrit là correspondait directement à sa propre vie du moment. Il se trompait.
Complètement.

Et si un ghost writer, qui n’en peut plus de produire les succès littéraires d’un autre, décidait que les choses devaient changer de la façon la plus radicale qui soit ? Et si un écrivain, lassé d’écrire ce que le public souhaite, décidait de tuer celui qui lui vaut son succès ? Et si un jeune homme qui a lu les romans de ce duo d’écrivains décidait lui aussi que tout ceci devait cesser ? Il n’en faut pas plus pour que questions et menaces se mettent à pleuvoir. Qui est réellement fou ? Qui est réellement écrivain ? Qui est vraiment l’auteur de lettres anonymes ? Qui est réellement assassin ?

« Les grands méchants loufs s’arc-boutent d’emblée sur le monde quotidien, à travers une intrigue qui progresse sur plusieurs niveaux et met en scène quelques personnages dont certains semblent familiers à l’auteur. Celui entre autres d’un nègre qui multiplie des livres alimentaires pour le compte d’un auteur à succès. Sa description, ses difficultés, ses rapports avec son “employeur” forment la meilleure part du récit sur lequel se greffe le cas d’un jeune louf qui a des idées de meurtre derrière la tête. Pierre Suragne [la première édition est parue sous ce pseudonyme] a, on le sait depuis longtemps, un réel talent de conteur et son histoire ici est fort bien menée. » (Alexandre Lous, Le Magazine littéraire, octobre 1977)

Le thème de ce polar frénétique est aussi celui de l’écriture : c’est un récit réflexif ou une mise en abîme du travail de l’écrivain. L’intrigue n’en est que plus palpitante, car elle sonne vrai. Le style Pelot, c’est cette écriture au rasoir, des personnages de chair et d’os, une électricité, un jaillissement qui paraît parcourir les livres d’un bout à l’autre, sans répit. Quand on a été happé par sa « petite musique », on devient accro. Et c’est une bénédiction, car cette drogue-là ne connaît guère de pénurie vu sa production surabondante allant du polar à la science-fiction en passant par le western. Il figure avec Arnaud et Dard (plus connu du public sous son nom de plume, San-Antonio) dans le podium des recordmen de l’édition française en nombre de titres.

Le polar aura en tout cas permis à Pierre Pelot d’être plus près que jamais de ses personnages, dépouillés devant le lecteur jusqu’à l’os. Chacun de ses titres aura en effet été pour lui l’occasion d’entrer dans l’esprit humain comme dans un labyrinthe fascinant. Ouvrir un polar de Pelot, c’est ouvrir une porte secrète, aussitôt les saveurs les plus fortes s’en dégagent… ce n’est pas seulement se faire un bon polar, c’est toute une expérience.

Les grands méchants loufs, absent des rayonnages des librairies depuis trop longtemps, n’est pas seulement un roman qui témoigne de son époque, c’est surtout un grand roman noir que la verve et l’humanité de Pierre Pelot ont su rendre universel, atemporel. L’œuvre surabondante de ce dernier regorge de trésors oubliés. Celui-ci en est un et non des moindres.

Cette réédition a été soigneusement relue et corrigée par l’auteur. Elle est augmentée d’un avant-propos inédit de Pierre Pelot lui-même dans lequel il se raconte et suivie d’une passionnante postface de Claude Ecken, spécialiste de l’auteur, qui décrit « Soixante ans d’écriture », une véritable introduction à un immense auteur populaire auquel on doit des best-sellers tels que C’est ainsi que les hommes vivent et L’Été en pente douce, par ailleurs gros succès du cinéma des années 1980. Et qui, aux côtés de Manchette, Siniac, et Vautrin, a participé au renouveau du roman noir français, tous ayant « un double dénominateur commun : un style narratif, direct, soucieux de l’efficacité, sans digression, sans bavardage psychologique gratuit : des sujets liés à l’actualité la plus immédiate, avec en filigrane des ramifications dans le monde politique et économique. En un mot, l’omniprésence du quotidien dans ce qu’il a de plus sordide, de plus dérisoire, de plus violent, de plus impossible. Et des mots de tous les jours. Et du sexe. Et du drôle et du dingue… » (Alexandre Lous)

Parution : mai 2025

Edition courante

Format : 14 x 21,6
Reliure : broché
172 pages

ISBN : 978-2-37650-168-8

Prix : 16,00 €

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